II.
LE SOL ET
LES ASPECTS ENVIRONNEMENTAUX
Le sol est un milieu très fragile sensible aux interventions humaines et aux changements de l’environnement. Aujourd’hui, de nombreuses menaces liées aux activités humaines pèsent sur les sols. Suite à ces menaces, la fertilité des sols diminue, ce qui provoque une diminution de la biodiversité ainsi que du rendement et de la qualité des cultures. La capacité des sols à filtrer et à réguler le cycle de l’eau est également compromise.
On estime aujourd’hui qu’environ la moitié des terres émergées a été touchée par des modifications d’origine humaine. Les effets négatifs se font ressentir tant sur la faune et la flore que sur la santé humaine.
Les menaces les plus pressantes qui pèsent sur les sols sont :
1. La pollution des sols
De multiples substances dangereuses sont directement rejetées dans le sol (huiles, détergents, hydrocarbures…) ou répandues en surface avant de la pénétrer (engrais synthétiques, insecticides, herbicides, fongicides…). D’autres pollutions sont provoquées indirectement par des retombées atmosphériques (fumées, particules, métaux lourds…) ou des infiltrations d’eau (rejets d’eau non épurés, pluies acides…).
Ces pollutions affectent directement la vie des organismes végétaux et animaux qui vivent dans le sol, s’accumulent, éventuellement, tout au long des chaînes alimentaires ou se dispersent dans l’environnement. À long terme, la fertilité du sol diminue et par conséquent le rendement et la qualité des cultures. Parfois, le sol devient stérile.
Voici quelques exemples de sources de pollution du sol au niveau domestique :
- les fuites de mazout provoquées par une citerne corrodée ou par un débordement lors du remplissage de la citerne ;
- l’eau de nettoyage, qui contient des substances nocives pour les écosystèmes (détergents, eau de Javel, etc.) ;
- les produits phytosanitaires utilisés au jardin (engrais, désherbants, insecticides, herbicides, fongicides…) ;
- les petits déchets dangereux (restes d’huile de friture, d’hydrocarbures, de solvants, d’essence de térébenthine, d’insecticides domestiques, de pots de peinture ou de vernis…) dont on se débarrasse dans le fond du jardin ;
- les déchets solides qui sont abandonnés dans des dépôts clandestins, comme les vieux électroménagers, les vieux meubles, les pneus, les textiles et matelas… ;
- les piles qui sont abandonnées dans la nature (une simple pile bouton de type « montre » pollue, par exemple, 1 m³ de terre pendant 50 ans).
N’oublions pas que la pollution d’un sol peut constituer un risque important pour la santé humaine. Les hommes peuvent être exposés à cette pollution de différentes manières :
- en mangeant des légumes qui y ont poussé et ont accumulé des substances indésirables ;
- en mangeant des oeufs de poules qui ont ingurgité des particules de sol (notamment contaminées par des dioxines) ;
- en respirant les émanations néfastes qui s’en dégagent (ex. : fuites d’hydrocarbures) ;
- en buvant l’eau qui a traversé le sol pollué (infiltrations des polluants via les conduites) ;
- en avalant des particules du sol (ex. : enfants qui jouent avec l’herbe ou la terre en zones polluées).
2. La dégradation de la qualité du sol
Suite à différents impacts des activités humaines, la qualité du sol se dégrade, ce qui se solde pour l’Homme par une diminution du rendement des cultures. Cette dégradation peut prendre différentes formes :
- L’érosion du sol
Les sols arables sont fragiles. Souvent très minces (quelques dizaines de centimètres), ils craignent l’érosion éolienne ou pluviale. Ceci signifie que la fine couche de terre arable est emportée par les vents ou les précipitations. Il ne demeure alors que le sol nu (roche, argile, sable) qui ne permet pas aux plantes de se développer. Le rendement agricole diminue et la désertification s’installe.
Une des causes principales de l’érosion des sols est la déforestation. Ce sont les racines des arbres qui retiennent les sols. La déforestation galopante qu’on constate actuellement dans de nombreuses régions du globe est donc responsable de la perte de grandes superficies de sol arable. D’autres facteurs peuvent causer ou accentuer le phénomène d’érosion comme le surpâturage, la surexploitation des terres, la monoculture, les labours mécanisés, la destruction des obstacles (haies, talus, fossés ou murets) en vue d’augmenter la taille des parcelles, les sillons tracés dans le sens de la pente et la mauvaise gestion de l’eau, les sols laissés à nu, etc. Plus localement, la pratique de certains loisirs (VTT, quad, moto-cross, etc.) participe également au phénomène d’érosion.
En Europe, de nombreux sols agricoles sont actuellement menacés par l’érosion. Cependant, les problèmes liés à la dégradation des sols sont de plus grande ampleur en Asie, en Afrique et en Amérique latine en raison de la nature des sols et des sous-sols et des conditions climatiques qui y règnent (fortes pluies, sécheresse, etc.).
- L’appauvrissement des sols suite à la surexploitation
Les sols arables sont des écosystèmes fragiles. Les plantes qui s’y développent y puisent leurs éléments nutritifs. Chaque récolte appauvrit donc un peu plus le sol. Afin de garantir la récolte suivante, le sol doit se régénérer. Suite à des pratiques agricoles inadaptées (cultures non adaptées à la qualité du sol, non-rotation des cultures, non-apport de matières organiques) ou trop intensives, les sols peuvent être surexploités et n’ont plus le temps de se régénérer et de se recharger en éléments nutritifs après la récolte. Ces terres fertiles sont donc susceptibles de devenir stériles.
On essaye parfois de prévenir cette perte de la fertilité du sol par l’utilisation d’engrais chimiques, mais dans de nombreux pays, une utilisation trop intensive d’engrais ou un mauvais dosage a encore aggravé la situation. Des terres anciennement fertiles ont été littéralement brûlées par les engrais, leur fertilité a diminué et elles sont devenues stériles. Par contre, lorsque le sol est entretenu grâce aux engrais organiques, ce phénomène est non seulement évité, mais de plus, la qualité des sols s’améliore.
- Le tassement du sol suite à l’agriculture intensive
Le passage des engins agricoles lourds modifie la structure du sol. Celui-ci se tasse et devient imperméable à l’eau et à l’air. Quand il pleut, l’eau de pluie s’écoule rapidement (plutôt que de s’infiltrer dans le sol) en causant des inondations et des coulées de boue qui emportent la couche de terre arable. En même temps, la quantité d’eau contenue dans le sol diminue et le sol s’assèche. L’air ne circule plus dans le sol, et ce dernier s’asphyxie. Le rendement et la qualité des cultures diminuent, les zones arides et désertiques s’étendent et les nappes phréatiques souterraines ne sont pas approvisionnées suffisamment. Dans certaines régions très fragiles, des pénuries d’eau et de nourriture en sont la conséquence. Dans nos régions, cette mécanisation de l’agriculture et l’introduction de cultures non adaptées à nos sols (par exemple, le maïs originaire du Mexique) provoquent des dégâts sans cesse croissants.
- L’imperméabilisation du sol suite à l’urbanisation
L’Homme ne cesse de construire des villes, des bâtiments, des routes, des parkings… Cette urbanisation massive a pour conséquence le recouvrement de grands espaces par des surfaces imperméables (béton, pierre, bitume…). En cas de pluie, l’eau ne s’infiltre pas dans le sol, mais s’écoule rapidement, ce qui peut provoquer des coulées de boues, des glissements de terrain ou des inondations.
- La salinisation du sol suite à l’irrigation intensive
Dans les régions chaudes, l’irrigation des cultures peut entraîner une salinisation des sols. En effet, l’eau apportée contient toujours des sels dissous qui restent dans la terre après évaporation de l’eau. Au fil du temps, ces sels s’accumulent dans la couche superficielle du sol, jusqu’à le rendre impropre à la culture. La dégradation du sol est parfois telle qu’on assiste à la désertification du milieu.
3. La perte des surfaces naturelles et des sols arables
Suite à l’agriculture intensive et à l’urbanisation galopante, nous perdons, chaque jour,
des zones naturelles et du sol arable.
- La conversion des surfaces naturelles
La conversion des sols, c’est-à-dire le passage d’une catégorie d’occupation ou d’utilisation à une autre, tel que le passage de surfaces boisées en prairies ou en terres cultivées, provoque la perte des surfaces naturelles et arables. Aujourd’hui, il existe environ 12 000 parcs nationaux et autres zones protégées dans le monde. Malgré ce fait, nous perdons chaque jour des paysages naturels, comme les forêts tropicales, les savanes et autres territoires sauvages.
Le premier responsable du rétrécissement permanent des zones naturelles au niveau mondial est notre mode de vie et d’alimentation. Suite à l’accroissement de la population et à une alimentation basée de plus en plus sur la viande, les besoins de surfaces agricoles augmentent constamment. Chaque année, d’importantes surfaces naturelles sont donc converties en surfaces agricoles ou en pâturages. Il s’agit souvent de forêts vierges qui sont brûlées pour faire place à des champs. Malheureusement, les terres ainsi gagnées sont souvent peu fertiles. Généralement, elles s’épuisent après 2 à 3 récoltes. L’agriculteur est obligé de brûler une nouvelle parcelle de forêt vierge afin de pouvoir continuer à cultiver la terre. Les terres épuisées sont laissées à l’abandon et sont rapidement victimes de l’érosion.
De cette manière, de grandes étendues de forêt vierge sont perdues chaque année pour être d’abord converties en terres agricoles qui se transforment en désert après quelques années seulement.
Le deuxième responsable de la réduction des espaces naturels et des terres arables est l’urbanisation et l’aménagement du territoire. Dans les zones habitées, l’Homme moderne occupe beaucoup de surface qu’il utilise pour les bâtiments (habitat, travail, magasins…), le déplacement (routes, autoroutes, rails, parkings…), l’approvisionnement (usines, hangars…), les loisirs (aménagements sportifs, campings, parcs, jardins…) et les cimetières. Les surfaces recouvertes par l’urbanisation sont souvent des terres arables de bonne qualité. En les couvrant, ces terres fertiles seront définitivement perdues pour l’agriculture.
Petite histoire de l’urbanisation
Au fil des deux derniers siècles, notre manière d’habiter s’est transformée. Au début du 19e siècle, la grande majorité de la population habitait et travaillait dans des villages. Suite à la révolution industrielle, de nombreuses usines se sont développées et ont attiré la population dans les villes. À partir des années 1970, suite à l’augmentation du niveau de la vie, les gens préfèrent vivre à la campagne dans des maisons unifamiliales spacieuses, entourées d’un grand jardin, mais à proximité des villes, où ils travaillent. Pour créer ce modèle d’habitat, des zones agricoles et naturelles à l’extérieur des villes sont transformées en lotissements. Des banlieues ont ainsi été créées. À l’opposé des villages traditionnels, où l’habitat était confiné et très rapproché, les lotissements modernes sont très étendus. Le nombre de mètres carrés de sol utilisé par personne a augmenté fortement pendant le siècle dernier.
À côté des lotissements, de nombreux zonings industriels et commerciaux ont vu le jour dans ces mêmes zones de banlieue. Pour permettre aux habitants de la ville l’accès à ces zonings, et aux habitants des lotissements, l’accès aux services de la ville (bureaux, magasins, école, hôpitaux, infrastructures sportives…), des routes supplémentaires ont dû être construites et le réseau routier s’est agrandi considérablement. Pour créer ces infrastructures, l’Homme a colonisé les espaces naturels (forêts, prairies, zones vertes) et les surfaces agricoles qui entouraient jadis la ville. Une autre conséquence qui découle de ce développement est l’accroissement considérable du trafic routier, avec tous les inconvénients que cela comporte (pollution de l’air, consommation d’énergie fossile, réchauffement climatique, embouteillages…).
- Le réchauffement climatique
Suite au réchauffement climatique, de plus en plus de sols sont menacés de submersion marine (conséquence de la montée du niveau de la mer et des océans) ou de désertification. Ces deux phénomènes sont actuellement surtout observés dans les pays du Sud, mais les pays du Nord ne sont pas à l’abri. Ainsi, la côte belge est menacée de submersion et les dunes de disparition, tandis que le sud de la France et le centre de l’Espagne sont menacés de désertification. Les deux phénomènes vont encore accentuer la pression qui est exercée sur les terres arables.
On estime qu’en Belgique, une hausse de 1 mètre du niveau de la mer aurait pour résultat que près de 63 000 hectares de terre se retrouveraient sous le niveau de la mer. Ce qui augmente le risque qu’ils soient submergés par les eaux, dans le cas d’une rupture de digues ou lors d’une tempête exceptionnelle.